Cryoglobulinémie
Physiopathologie moléculaire
Les cryoglobulines sont des protéines du sérum qui sont solubles à 37°C mais précipitent à température plus basse. La base moléculaire de la cryoprécipitation reste incertaine. Des changements dans le contenu en hydrates de carbone pourraient être une cause potentielle.
Détection des cryoglobulines
Les prélèvements de sang doivent être effectués à l'aide de seringues préchauffées. Une centrifugation immédiate à 37°C prévient une précipitation des cryoglobulines avec le culot cellulaire. Le sérum est ensuite récupéré et incubé à 4°C pendant au moins 72 heures. Les cryoglobubines précipitées sont détectées après centrifugation dans un tube capillaire.
Classification et syndromes cliniques
1. Les cryogîobulinémies de type 1 sont monoclonales et représentent 20 p. 100 des cas. On les observe dans le myélome multiple, la macroglobulinémie de Waldenstrôm, la LLC et les LMNH. À l'exception du myélome multiple (cryoglobulines de type IgG), il s'agit majoritairement d'anticorps de type IgM. Dix pour cent des composantes M dans le myélome multiple et 20 p. 100 des composantes M dans les macrogiobulinémies présentent un phénotype de cryoglobulinémie. Les symptômes sont principalement dus à la diminution voire à l'absence de circulation sanguine dans les capillaires cutanés. La température basse de la surface de la peau fait précipiter les cryoglobulines dans les vaisseaux, provoquant une augmentation de la viscosité du sang jusqu'à l'occlusion. Ce mécanisme induit le syndrome de Raynaud (voir p. 176), ainsi que des nécroses des extrémités, une acrocyanose, un purpura vasculaire ainsi que des ulcères polyneuropathiques aux chevilles.
2. Les cryogîobulinémies de type II sont composées d'une Ig monoclonale (en général IgM, rarement IgA ou IgG) et d'une Ig polyclonale de type IgG. Quarante pour cent des cryogîobulinémies appartiennent à ce type. La composante monoclonale montre une réactivité vis-à-vis des fragments F(ab)2 des Ig polyclonales (activité de facteur rhumatoïde). Les chaînes légères des Ig monoclonales sont en général de type K. Dans un tiers des cas, aucune maladie sous-jacente n'est retrouvée (cryoglobulinérnie mixte idiopathique). Dans les autres cas, elle est associée souvent à une hépatite, rarement à une connectivité ou à autre maladie auto-immune et à des maladies lymphoprolifératives.
3. Les cryogîobulinémies de type I I ] sont composées d'Ig polyclonales (en général des IgM) réactives vis-à-vis des molécules IgG et IgA polyclonales (type mixte polyclonal). Quarante pour cent des cryogîobulinémies appartiennent à ce type. Les cryogîobulinémies de type III sont associées à diverses infections et maladies auto-immunes mais sont aussi retrouvées comme syndrome primitif.
Dans une cryoglobulinémie mixte, les complexes immuns d'Ig précipitent dans les parois des vaisseaux et provoquent une vascularite. Un purpura vasculaire est donc le symptôme essentiel (saignements en forme de points ou taches aux extrémités inférieures). Dans la région des chevilles, des ulcères peuvent se former. Des polynévrites motrices et sensitives se manifestent sous forme de parésies et dysesthésies. Soixante à 70 p. 100 des patients souffrent d'arthralgies, particulièrement aux mains, aux genoux, aux articulations des pieds et des coudes. Ces douleurs peuvent être accompagnées d'érythèmes ou d'œdèmes mais pas de déformation des articulations. Plus de 50 p. 100 des patients développent une néphropathie. L'histologie montre en général une glomérulonéphrite diffuse proliférative due aux dépôts d'Ig et de complément. Le pronostic des cryogîobulinémies dépend de la maladie sous-jacente. Outre la protection contre le froid, on prescrit des corticostéroïdes et des agents immunosuppresseurs, ainsi que l'interféron α.
La cryofiltration permet d'éliminer de grandes quantités de cryoglobulines du sang dans des situations de crise.